Belle année, bonne année, super année… quelques sms, quelques coups de fil. C'est drôle cette année, on a moins envie de la souhaiter. Peut-être que les nouvelles du monde qui gronde et hurle nous oblige au silence ? Ou peut-être que ça sonne faux ? J'ai lancé un appel sur les réseaux pour dire que j'avais envie qu'on m'appelle, que le téléphone portable c'était d'abord un téléphone… qu'une voix amie c'était mieux qu'un sms… que j'avais envie de vous entendre ! Bon, résultat, dimanche dernier, j'ai passé ma journée entière au téléphone !!!! Et hier, entre midi et deux, record battu : 2h08, 13 secondes avec une amie très chère… on avait BEAUCOUP de choses à se dire (et encore je crois que je ne lui ai pas tout dit !!).
Cette année, moi j'ai envie qu'on se voit. J'ai envie qu'on se revoit. J'ai envie qu'on s'embrasse. J'ai envie qu'on se serre dans les bras. J'ai envie qu'on se dise qu'on tient les uns aux autres. Je n'ai plus envie de sms ou whatsapp envoyés entre un achat de baguette, une liste de courses, entre la poire et le fromage… j'ai envie de week-end partagés, de yeux dans les yeux, de longues marches le long de la mer à discuter, de me glisser sur une épaule sur un banc dans un parc en refaisant le monde plus beau, de soutenir les amies qui souffrent parce que malades, parce que leur maman est partie, parce que leur mari…
Oui j'ai envie de tout ça !
Les fêtes ont été chouettes. Oui. Vraiment chouettes. J'ai passé mon premier Noël seule avec mes trois garçons à Cancale et ce fut magique ! Exactement comme je le voulais. Mon ami extraordinaire cuisinier des épices Emmanuel nous a concocté un cours incroyable et régalé les papilles, débarquant tel le père Noël. Un cuisinier corsaire comme ami et la vie est bien bien plus jolie ! J'ai adoré cette ville remplie de personnes attachantes, mentions spéciales à Sandrine Louvet Delarose la fleuriste aux doigts de fée qui m'a trouvé un petit sapin tout blanc à la dernière minute et avec qui les échanges ont été plus que divins et chaleureux. Sa belle enseigne, c'est mieux que l'atelier du Père Noël ! Et pas besoin de se connaître depuis longtemps pour échanger du soutien, de la douceur et du partage. Mention spéciale aussi au Jardinel, où mon dernier a pu déguster le hamburger dont je lui parlais depuis longtemps. Il faut dire que j'ai découpé un thon de 68 kilos avec le propriétaire, chez Emmanuel justement. Ici aussi, de la chaleur, des échanges fructueux et adorables… Il paraît que je transporte des tonnes d'ondes positives ! Mention spéciale aussi à Pierre du bar institution Le Galion, où j'ai choisi des vins divins et mon gin (j'ai fait une entorse à l'Irlande… en élisant un écossais tourbé à souhait) à la Cale, endroit génial, île aux trésors. Et puis, c'est là que j'ai célébré au soleil ma baignade du jour ("Quoi, mais t'es dingue ? Elle est à combien, là ? 9 degrés ? T'avais une combi ?" "Heu non…"), avec une tablée trop chouette qui préparait déjà les régalades du soir, entre coquilles glanées au pêcheur, feu de cheminée et choix de vins alsaciens… on est super bien à Cancale !
Bon, faut que je vous avoue un truc… j'ai commis un sacrilège. Mais bon, on a bien rigolé ! J'ai été éduquée dans l'éducation un peu stricte catho. Mais pour moi la messe c'était chanter des chansons joyeuses avec le guitariste à la barbe rousse qui ressemblait à François Corbier du Club Dorothée. On avait même le droit de faire des chorés sur l'autel avec mes copines danseuses. Le prêtre était super cool, et puis on réfléchissait au sens de la vie, cela ne nous faisait pas de mal. Et puis je me suis fâchée avec Dieu. Il avait laissé partir ma meilleure amie. Je trouvais que 17 ans c'était un peu trop jeune. Et vraiment dégueulasse. Bon, j'avais un peu raison, non ? Je suis revenue, je suis repartie. Et quand j'ai été malade, il y a eu ce jour horrible où j'ai demandé à Dieu de m'aider parce que j'étais assise à table en face d'un homme rempli de haine et de violence et que honnêtement là, je ne voyais pas d'autres issues… j'ai pensé un timide : "Dieu si tu existes, je te promets de retourner à la messe si tu fais quelque chose"… et là mon téléphone avait sonné avec le nom aimé d'un auteur-ami admiré qui s'était affiché. Un vrai miracle.
Bon, j'y suis retournée. Un peu. J'ai rechanté. Beaucoup. Les chants de messe quand même dans un belle basilique épurée, remplie de lumière filtrant à travers les vitraux… cela m'apaise. J'aime l'odeur de l'encens et les vieilles pierres des églises. Mais je connais beaucoup de personnes (je sais vraiment de quoi je parle…) qui vont à la messe tous les dimanches mais qui ne savent absolument pas prendre soin des personnes qui les entourent. J'ai toujours du mal à comprendre qu'on ne garde que le côté "entre soi" ou "bonne conscience" de la religion dont le message est tout de même d'abord de s'occuper et d'aimer son prochain… mais pas besoin de religion pour ça, non ?
Alors, ce blasphème ? Avec les enfants, on avait décidé d'aller à la messe pour Noël. Une fois dans l'année, allez quand même… et puis Noël, sans "Il est né le divin enfant" et la trompette qui sonne faux… bah pour moi, cela manque un peu de saveur. Alors, on va à la messe. En retard parce qu'un de mes fils avait décidé de prendre une douche 5 minutes avant de partir. Je l'avais autorisé parce que je n'avais pas calculé qu'il pouvait y rester un quart d'heure. Donc on était en retard. Église bondée. Debouts au fond. Plus de place. On se regarde. On reste un peu. Dix minutes. "Allez, je vous emmène au bistrot". Les enfants sont un peu interloqués. Et moi, je fais en fait ce que j'ai souvent rêvé de faire pour être honnête. On est parti le coeur léger, sautillant, riant. L'impression d'être un peu rebelles quand même. Et on est parti à la maison boire du gin. Écossais.
Ce Noël a été mémorable. Un Noël comme je l'avais rêvé. Et je ne vous parle pas des balades sur le sentier douanier, des huîtres incroyables achetées sur le port, à deux pas de la maison, de la vue imprenable sur la baie, du Mont Saint-Michel en ligne de mire, des couleurs pastels qui n'existent qu'ici, de la mer émeraude, des levers et couchers de soleil à couper le souffle, des bernaches, des huîtriers pies, des gravelots, de la jetée et bien sûr des divins homards, Saint-Pierre, coquilles… Merci Cancale ! Merci Emmanuel. Infiniment. Mes enfants sont repartis avec des épices, des recettes et des souvenirs. Ce Noël sera fondateur. J'en suis sûre.
Et le 31 ? Et bien, cela avait pourtant mal commencé. Étant seule de chez seule, j'ai hésité à partir comme l'année dernière, au dernier moment. À Rome. Mais je n'avais pas envie de Rome cette année. Et mes enfants étaient encore dans le coin. Mais personne ne m'avait proposé de faire quelque chose. Honnêtement, j'étais dégoutée. Non que je veux faire quelque chose obligatoirement, mais la perspective d'être toute seule devant une série Netflix… je trouvais cela glauquissime. 30 décembre, la trop chouette directrice d'un hôtel auberge de jeunesse que j'ai interviewée il y a deux mois m'invite à boire un verre pour me remercier de mon article. Elle me propose alors pour le lendemain d'aller aider un ami restaurateur durant le service…
… Et bien oui, trois fois oui ! Allez hop ! Qu'est-ce que je risque ? Au pire c'est bof et je pars à minuit… Et bien, il est 18h50, je m'avance rue de Saint-Malo… et je découvre un café restau trop sympa, des tables joliment dressées. Tout le monde est prêt. Un verre de Prosecco m'est servi. Une ravissante dame, prénommée Monique, yeux bleus foncés brillants, élégamment habillée, une écharpe orangée autour du cou, s'avance… je suis sûre qu'elle sent la violette… "Vous êtes drôlement belle madame, qu'est-ce que vous êtes élégante" "Vous savez, je n'ai pas envie que mes petits-enfants me traitent de vieille… et quand on est vieille, tout ce qui reste c'est l'élégance et la bouffe !" "Et bien, pour l'élégance vous êtes vraiment au top et pour la bouffe, vous avez bien fait de venir ici, je viens de passer en cuisine, vous allez vous régaler !" "Je préférais être ici que seule devant dans mon canapé" "Et bien figurez-vous que c'est exactement comme moi Monique". Quelques verres de vin blanc plus tard, les autres convives sont arrivés, dont deux tables immenses de 24 jeunes trentenaires déguisés en marinières et chaleureux à souhait… le service peut commencer.
Je sers le champagne, les premiers plats… le tout avec sourires, rires et fous rires. La bonne humeur régnant dans toute la salle est contagieuse. Les deux tables de djeun's sont trop cool. "Bon, Isabelle, tu fêtes quoi ? Qu'est-ce qui tu enterres en 2023 ?" "Heu… mon divorce ?" Verres levés, tous se mettent à trinquer à "la nouvelle liberté d'Isabelle !!! Une nouvelle vie pour Isabelle !! Vive Isabelle !" "Allez, viens manger avec nous !" Il n'y a pas si longtemps, j'aurais pleuré. Mais là, je souris, oui, je souris. Il se passe quelque chose dans cette salle, ce soir-là. Monique est aux anges.
L'un d'entre eux fête son anniversaire. Je lui propose de l'aider à écrire un discours. Nous nous mettons sur un coin du bar, avec un crayon et un carnet de commandes, partis dans un énième fou rire. Il déclamera les mots un peu brinquebalants (je n'étais pas très concentrée et il a eu du mal à lire mon écriture) plus tard, debout sur une chaise, tout le monde applaudissant, me remerciant à la volée… clameur de "Isabelle, Isabelle, Isabelle"… la classe ! C'est alors qu'un vendeur de roses arrive et il y en a pour moi… mais que j'ai bien fait de venir ! Des filles de la tablée viennent me voir et me confient qu'elles s'interrogent sur mon âge et que tout le monde a fait des paris… et bien ils ont tous perdu ! Ils ne veulent pas me croire… c'est trop drôle et hyper flatteur. J'ai plus de dix ans de moins dans leurs yeux. Les filles me couvrent de compliments. Certains viennent se confier à moi… Cette soirée est encore plus douce que prévue… et quand le service est terminé, nous poussons tous les tables pour pouvoir danser, c'est le bonheur intégral ! Chacun va choisir son titre de prédilection. Les filles veulent une prière païenne. Céline Dion n'a qu'à bien se tenir ! Nous enflammons la piste et rions et rions encore. Légèreté incroyable ! Je vais danser jusqu'à… six heures du matin, puisant mon énergie dans tous ces regards sympas, bienveillants, remplis de douceur et d'empathie.
Et même, avec élégance, l'un d'entre eux me raccompagnera chez moi, avec beaucoup de courtoisie. Pour tout vous dire, je n'ai jamais réussi à m'endormir en rentrant. Il était quand même 7 heures. Alors, je me suis mise à écrire.
Résolution 2024 : continuer sur ce chemin. Il me réussit plutôt bien. Oui, je vais bien. Très bien même. Le nouveau médecin qui me suit a fortement diminué les traitements. On est proche de zéro. Bientôt. Et il remet en cause le diagnostic. Sérieusement même. Je vais peut-être bientôt me débarrasser d'une étiquette. Or, vous savez combien j'aime les décoller, les décaler, les faire éclater !
Mes adresses fétiches à Cancale :
Cuisine corsaire école
L'école de cuisine de mon cher Emmanuel Tessier, ancien second d'Olivier Roellinger. Vous pouvez y réserver des cours incroyables auprès d'un expert qui est aussi un conteur né, des balades en mer de folie sur des vieux gréements avec cuisinier trois étoiles à bord (testées moultes fois et mille fois approuvées, à faire absolument une fois dans sa vie au moins, mais vous reviendrez c'est sûr et certain !) Et petit clin d'oeil… les textes du site sont bien écrits, hein ?
La jolie fleuriste tellement adorable !
Le Jardinel, cuisine du monde trop bonne et propriétaires trop trop sympas.
Le Galion, bar institution de Cancale, avec la superbe cave La Cale, aux étiquettes à rêver… Jean est à la barre et il assure… grave !
23h49 je sais il est tard pour avoir mon tél en main mais difficile de résister quand un article de ..... paraît et je ne regrette pas. Quelle jolie écriture, idéale et réconfortante avant de dormir!!!!