Je n'ai jamais vraiment eu de collègues, au sens où je n'ai jamais eu vraiment de CDI (enfin si une fois, cela a duré cinq ans, mais c'était un CDI de pigiste). Journaliste, le terme est prestigieux, mais la réalité est tout autre… stages non rémunérés (beaucoup), CDD (beaucoup aussi) et surtout la divine pige (énormément), qui vous paye à l'article. Imaginez la précarité. J'ai été payée, un peu, jamais beaucoup, mais toujours passionnément 😉… en fait, nous sommes un peu comme les artistes (sauf qu'on n'a pas d'intermittence), comme si on nous faisait payer le fait d'exercer un métier de passion. Bah, oui je ne travaille pas, je m'amuse. Et bien, c'est vrai en fait, tous les jours, toutes les soirées, tous les week-end, je m'amuse. Je saute d'un sujet à l'autre avec un bonheur absolu. Mais je travaille. Donc vous devez me rémunérer et à la juste hauteur de mon boulot. Non mais.
Mon tout premier stage s'est déroulé au Figaro. Imaginez mon émoi quand j'ai su que j'étais prise. Se retrouver au sein d'une vraie rédaction… le rêve ! J'ai fait un stage d'un mois, une expérience pas trop concluante, avec harcèlement du chef de service qui m'a carrément demandé de venir travailler dans son bureau avec un regard gluant très appuyé… Figée à mon bureau, j'ai quand même réussi à lui dire, alors que ma gorge s'était nouée et que tous mes sens m'ordonnaient de partir en courant : "Vous voulez que je vienne sur vos genoux aussi ?" Ma copine en face était morte de rire… et les mouches ont volé dans la rédac. Il ne m'a plus jamais gonflée. Je n'étais pas payée, on m'a fait comprendre que limite c'était moi qui devait payer pour être là. Je pleurais tous les jours dans les toilettes… Ils ne nous donnaient rien à faire, sauf de réécrire les dépêches à partir de 16h… alors j'ai arpenté les autres services… et j'ai réussi à glisser un article sur les crampons de foot ! Oui ! Parce dans le service sport, les journalistes étaient carrément plus cool. Alors je voulais bien écrire sur les crampons de foot, vissés, moulés… mais surtout vissés ! J'étais dégoutée de cette première expérience, mais pas question de renoncer. Jamais.
Donc, oui, jamais vraiment de collègues. Ou des collègues en CDD… Aujourd'hui, j'ai la chance de pouvoir utiliser les locaux d'une agence avec la sympathique bienveillance du directeur. Je viens quand je veux, quand j'ai envie. Le luxe intégral du bureau partagé ! Et j'ai enfin des collègues trop chouettes. Vraiment chouettes. C'est international ici, il y a du Québec, du Venezuela, du Vietnam… cela donne des fous rires et des Tabernacle ! À moi les burgers le midi pour fêter les anniversaires, les petits mots trop sympas pour me dire "Tu es ma première pensée ce matin en me levant, ça va le faire, tu vas y arriver, je suis avec toi !", les petits cadeaux colorés revenus de voyage… À moi aussi les "le café est prêt !", les gâteaux, les longues discussions pour être soutenue, les "je te serre fort dans mes bras pour te donner du courage", les "tu viens déjeuner ?" et tous les trucs de boulot qui nous rassemblent…
Avec ça, on arrive à vaincre le Fisc anglais et on est remontée pour les mauvais jours s'ils se repointent…
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